Archive for août, 2007

Téléphone rose

Avec l’avènement des webcams chaudes et des blogs consacrés au sexe, le téléphone rose doit être devenu complètement obsolète. Tous, sauf le mien.

Certains déboires téléphoniques m’avaient laissé entrevoir qu’il était peut-être temps de changer de téléphone.

J’ai une utilisation assez basique de mes téléphones portables. Un téléphone, ça sert à téléphoner. Quant aux divers accessoires greffables sur un portable, ils me font souvent l’effet de joujoux pour adulte dont la fonction est moins utilitaire que dans la tentative d’épatage de galerie intempestif. Donc, je m’en passe en général très bien. telephonerose

Evidemment, ils me gagnent petit à petit. Je crois qu’il a fallu qu’on me colle deux mois de SMS gratuits avec mon abonnement pour que j’y prenne goût. Pareillement, j’ai fini par me rendre compte que ça serait bien pratique d’avoir un appareil photo sur le portable, puisque je ne compte plus les fois où j’ai eu envie de prendre une photo alors que l’occasion ne se prêtait pas, a priori, à emmener un appareil dans mes affaires le matin. Et là, j’ai souscrit à un abonnement d’essai à des MMS gratuits pendant deux mois, moi qui n’en ai jamais envoyé un de ma vie. Cela me rappelle quelque chose. Vais-je finir par souscrire, vous croyez ?

En tout cas, s’il y a un avantage à ne pas changer de téléphone trop souvent, c’est que lorsque vous vous y mettez, tout a changé. Vous vous rendez compte que non, les amis qui vous ont montré leurs téléphones ne s’étaient pas ruinés en achetant les modèles les plus snobs. C’est simplement que maintenant, les modèles de base sont comme ça aussi, et un appareil qui va sur internet, prend des vidéos en 3D, vous rappelle vos rendez-vous tout en préparant le café et en vous proposant vos chansons préférées, est désormais à portée de votre bourse. En extrapolant un peu, j’imagine que les appareils les plus sophistiqués font aussi aspirateur, valise d’appoint et ont une fonction "appel par télépathie". Non ?

C’est un peu comme retourner au cinéma après cinquante ans d’absence, et découvrir d’un coup que maintenant, les films ont non seulement du son mais aussi de la couleur et des animations sophistiquées. On n’en demandait pas tant. Bref, on est bluffée.

Il y a de mauvaises surprises aussi. Vlatipa que Nokia ne fait plus les mêmes chargeurs qu’avant. Tant pis pour eux, moi qui leur étais restée fidèle les dernières fois à cause de cela. J’ai cédé aux sirènes d’un joli Samsung couleur "coral pink" avec lequel, si je le voulais, je pourrais regarder la télé sur Internet, écouter de la musique, etc etc.

J’ai trouvé en revanche que le magasin était tout à fait insuffisamment équipé pour la visite de jeunes enfants. Certes, on y trouvait une table garnie d’un tas de jouets (enfin, de téléphones factices quoi), mais les sièges qui l’entouraient étaient des sortes de tabourets de bar à un seul pied, beaucoup trop hauts pour qu’ils puissent y accéder seuls. Par bonheur, la table n’étant pas fixe mais tournant sur elle-même, mes demi-clones ont très vite eu l’idée de la faire tourner assez rapidement, ce qui a provoqué une éjection sauvage des téléphones. Limite, limite, niveau sécurité, donc, ces boutiques.

C’est sans doute pour se faire pardonner que la vendeuse, lorsque j’ai eu tout signé, tout payé, et que mon nouveau jouet fut enfin en ma possession, ma carte SIM calée dans ses entrailles, est allée chercher dans sa réserve deux téléphones de démonstration pour les offrir à mes demi-clones.

Ils ont passé plein d’appels avec depuis (la plupart à leur papa). De futurs clients, certainement?

 

Volatil

"Et bien moi, quand je serai mort, j’aimerais bien être une mouette" a dit Raphaël.

mouette

Mais où est-il donc allé pêcher que ce serait possible ? Il a parfois des raisonnements secrets que j’ignore ; mais d’où a bien pu partir celui-ci ?

Impair en nombre impair

Ca s’est joué à une minute près.

J’avais déjà mis un peu d’ordre sur mon bureau et éteint ma machine. Debout, sac à l’épaule, j’étais en train de souhaiter une bonne soirée à mes collègues, lorsque le téléphone a sonné.

Un coup d’oeil à mon cadran : Cela ne ressemble pas aux numéros des quelques clients qui connaissent ma ligne directe. Cela ressemble un peu au numéro professionnel de Lex, à qui j’ai pourtant demandé d’utiliser plutôt mon portable. Dans le doute, je décroche.

"Vous êtes Madame Tsouinn ?

Quand la première chose qu’on vous sort au téléphone, c’est votre nom tout écorché, en général c’est mauvais signe. Cela sent la liste téléphonique revendue à la sauvette, le spam téléphonique, et cela m’irrite. Mais là, je ne suis pas chez moi…. quel client est donc en possession d’une version fantaisiste de mon nom ?

Heu, oui, enfin, Cinn – Ah oui, le nom était mal écrit sur le papier… C’est le fleuriste Machin, nous avons des fleurs à vous livrer, pouvons-nous venir maintenant ? – … Mais je ne suis pas chez moi… – Mais vous êtes bien rue XXX ? – Heuu, oui, mais je suis sur le départ… – Je suis juste à côté, c’est de la part de Monsieur Yex ?"…

Des fleurs, là, maintenant, tout de suite ? Et de la part de Lex ?! Il me fait livrer un bouquet, là, juste quand je suis sur le départ ? C’est quoi ces manipulations foireuses ? Non mais il exagère ! Je vais en faire quoi, maintenant, de ce gros truc, dans les transports ?… (quoi, quoi, comment ça je ne suis jamais contente?).

La fleuriste insiste, plaide, supplie presque. Elle peut être là dans un quart d’heure. Cinq minutes. Deux minutes, le temps de l’emballer. Bien sûr, pour elle, c’est aussi un travail à terminer. J’accepte de l’attendre en bas de l’immeuble à ma sortie (imminente).

Un quart d’heure plus tard, je suis dans mon train, tenant contre moi un joli bouquet rond, et odorant aussi, car il est décoré de feuilles de cassis. Rouge sombre et vert menthe, enveloppé de papier vert pâle, noué par une cordelette. Du cassis. Sniffe, sniffe. Cette senteur. Ils ont bien fait les choses. Comment ont-ils fait pour savoir que l’odeur me rappellerait le jardin de la maison où j’ai grandi ?IMGP1941bis

Je suis touchée, évidemment. Lex m’a offert une seule fois des roses…  mais des roses virtuelles, alors que nous n’étions qu’amis. En termes plus terre-à-terre, une simple image. Au premier plan, des roses blanches. Juste derrière, des rouges.

Cette fois-ci, une enveloppe épinglée au bouquet contient une carte toute simple  : "Merci".

Chatotaf

"Quand on commence à chatter au travail… c’est fini!" m’avait prévenu un ami perdu de vue depuis. Lui, non seulement il surfait et chattait à tout va depuis son travail (ce qui à l’époque, il n’y a pas si longtemps, me paraissait impensable), mais il avait convaincu ses supérieurs de réorganiser l’aménagement du bureau d’une manière bien plus ergonomique… mais qui avait surtout pour résultat, comme par hasard, que les écrans d’ordinateurs de la pièce ne faisaient plus face à la porte d’entrée. Allez savoir pourquoi.

Pour moi, les choses ont bien changé. Je ne suis pas dépendante du chat, mais vivre une journée de travail sans des "récréations" Internet m’est difficile. Je suis en partie dépendante du net (en partie seulement, car m’en passer pendant les vacances ne me gêne finalement pas tant que ça), y compris pendant mes heures de travail. Et cela, ce n’est sain pour personne, ni loyal.

Pendant très longtemps, cela n’a posé aucun problème. J’avais souvent l’impression de lambiner, de perdre un temps incroyable. Je rendais mon travail un peu penaude… pour me voir féliciter de ma rapidité ! Mais je crois que ces derniers temps, j’ai perdu trop de temps dans ces "pauses". A améliorer.

Le hic, c’est que je me rends compte que la dépendance n’est pas la seule cause de mon envie de faire autre chose que travailler. Je me retrouve comme pendant l’essentiel de ma scolarité, lorsque je passais mon temps à gribouiller de petits dessins en écoutant d’une oreille l’école/les cours : mon travail m’ennuie.

Bien sûr, il y a mes collègues (tous sympas), un supérieur direct sans lequel je pense que je ne serais pas restée tant c’est une crème, mes voisines de bureau (les plus géniales du monde), les locaux (magnifiques), le matériel (toujours récent), et même les horaires (réguliers, donc faciles à gérer pour une mère de famille)….. Oui, mais mon travail en lui-même s’est mis à m’ennuyer prodigieusement, parfois au point de me mener au bord de la répulsion. Je n’ai la plupart du temps pas besoin de me concentrer sur mon travail pour le faire correctement. Certes, parfois c’est plus intéressant : il y a des recherches à faire, des trucs à bidouiller, à expliquer, à résoudre. Un petit compte-rendu à faire. Quasiment toutes des choses qui ne font même pas à proprement parler partie de l’objet de mon contrat de travail. Mais l’essentiel de mes tâches m’endort intellectuellement.

Est-ce pour cela que je supporte de moins en moins mes autres conditions de travail ? Je suis dans l’impossibilité matérielle d’organiser mon travail, je peux avoir à jongler entre plusieurs tâches sur un coup de sifflet en fonction des urgences (mais ce n’est pas moi qui en décide), quitter un travail sur un appel pour préparer un café ou régler un point de bureautique. Les formations ou évolutions qui miroitent, mais qui n’aboutissent jamais sur rien. Le travail donné comme à une machine, sans l’arrière-plan qui me permettrait de le comprendre.  Etre flexible est une chose, être un jouet, une autre.

Reste à savoir comment m’extraire de là.

Mouchards

La nuit tombe lentement. Sous la lune ronde, la voiture file sur l’autoroute vers la fin d’un week-end. Il conduit d’une main, tient de l’autre la mienne. Bercée par la route, je somnole presque. De la journée passée ne subsistent plus que des grains de sable restés collés à mes pieds. Obstinément, des grains de poussière de vacances.

Ouikende de rêve, deuxième

Résumé des épisodes précédents : partie en week-end prolongé avec un grand brun dont le génie pour sniffer des bornes Wi-Fi lui permet de donner quelques bribes de nouvelles à ses lecteurs adorés, Cinn avait néanmoins complètement oublié (ou, pour être tout à fait honnête : sciemment omis) de signaler son absence à Lex, qui menait de son côté, et pour quelques jours encore, la double vie de père et d’actif, jonglant entre les exigences de sa nounou et celles de son employeur. Y’a pas de raison qu’on soit toujours les seules à en baver non plus, non mais alors sans blague!…

C’était compter sans l’automobiliste qui a déboîté brusquement, sans prêter attention au fait qu’il envoyait voler à terre Lex et son scooter… avant de continuer sa route sans demander son reste. Lex est tombé tête la première sur le bitume, a roulé sur le sol et a perdu conscience.

Arrêt sur image. Grandbrun et moi sommes donc en "vacances" depuis un peu moins de vingt-quatre heures. Message téléphonique. Oui, Lex est vivant et conscient (sinon, il n’aurait pas pu laisser de message, soyez un peu logique, quoi!), mais il est à l’hôpital, attendant qu’on daigne s’occuper de son cas. Ca tombe mal, il avait un gros travail à finir aujourd’hui. Quant aux enfants, ils sont chez la nounou. Il me tiendra au courant pour me dire si je dois prendre la relève ce soir avec les enfants : "Je ne sais pas si tu as prévu quelque chose ce soir, enfin, je ne veux pas gâcher ta soirée…".

La soirée ?….  Si je reviens chez moi, c’est juste trois jours de congé, sans doute les seuls avant un bon moment, qui vont voler en éclats. Mais pour l’instant, lui ne le sait pas.

Lex attend son scanner. Oui, il me tiendra au courant des résultats.

Quelques heures plus tard, les résultats arrivent. Tout va bien a priori.

On a dit a priori. Car les médecins sont prudents dans ces cas là et n’excluent pas la thèse de la micro-hémorragie invisible au scanner qui va se réveiller sournoisement quelques heures après. Théoriquement, Lex ne doit donc pas rester seul pendant les prochaines 24 heures. Heureusement, il a prévenu ses amis les plus proches… et moi :

"… Si je dois aller à l’hôpital pendant la nuit, je te préviendrai"…

Ce qui serait tout à fait logique si j’étais effectivement chez moi… sauf que je suis à deux heures de route, et non plus à cinq minutes. Dilemne. Prendre le pari que tout irait bien, le laisser dans l’ignorance ? Impensable. J’aurai l’air de quoi après, s’il se passe quelque chose ?

Il a donc fallu que je révèle à Lex que je n’étais pas chez moi, avec la conséquence que cela entraînait : car pour Lex, mon absence (car je ne lui ai rien dit d’autre) ne pouvait signifier qu’une chose : il y avait quelqu’un d’autre dans ma vie. Pour lui, cela a dû faire beaucoup de choses à gérer d’un coup… et ses appels se sont multipliés dans l’après-midi (ma messagerie a été saturée le soir). Sérénité,guéguerre ? Impossible de savoir comment il va réagir à cette idée dans les semaines qui vont venir.

Si j’ai l’impression d’avoir ouvert une petite boîte de Pandore, du moins Lex avait-il cette fois les éléments suffisants pour évaluer plus clairement la situation immédiate. Il a été convenu que je ne viendrais qu’en cas de problème cette nuit-là, et non en préventif. Il lui suffirait de laisser les enfants en transit chez la voisine pendant deux heures. Ouf.

Les vacances pouvaient continuer.

Ou plutôt auraient pu continuer, sans une autre farce du "destin" : "Allô, rappelle-moi tout de suite, c’est très urgent!".

Lex : 2, Ouikende dolce vita : 1.

Ses clés…! il avait perdu ses clés. Il les avait cherchées partout, rien n’y a fait : elles avaient dû tomber de son blouson tandis qu’il était traîné sur le goudron après sa chute. Or, il m’en avait confié les doubles (clés de voiture et de son appartement). La suite ? C’était le serrurier ou moi. Sauf que le serrurier ne l’aurait pas aidé à récupérer l’usage de la voiture.

Ils sont combien au monde, les hommes prêts à faire six heures de trajet pour faire économiser à l’ex de leur amoureuse le prix d’un serrurier, et ce après que l’ex en question leur a pourri leur après-midi en appelant environ une fois toutes les demi-heures, ceux prêts à faire tout ça sans dire pis que pendre (du moins pas à haute voix) de la personne en question ? Ceux dont les bras ouverts, au retour, juste après minuit, sont capables de faire oublier en un instant les fatigues de la journée ?

Lex : 2 ; Week-end dolce vita : 25.

Un partout

C’est moi ou quoi ? Il y a des week-ends en amoureux qui prennent un tour inhabituel.

Est-ce que c’était vraiment un week-end, techniquement ? Le débat se pose. En tout cas l’occasion était magnifique. Quelques jours de congés pris il y a bien longtemps, prévus à l’origine pour emmener les enfants respirer l’air marin. Un changement de planning, voulu par Lex, a abouti à ce que les enfants restent avec lui pendant cette presque semaine de congés (quand on est en week-end le mardi soir, c’est presque un congé non?).

Il se trouve aussi que Grandbrun (c’est lui qui a choisi son pseudo, hein, alors on se tait), de son côté, se trouvait également en congés et dépourvu de sa descendance pendant ces quelques jours. Configuration astrale incroyable, inespérée, quasi-miraculeuse, donc, qu’il aurait été criminel de ne pas mettre à profit pour mettre les voiles (sens figuré) vers un joli petit port (au sens propre), à deux ou trois petites heures de route.

Nous avons formé une équipe très efficace. Grandbrun sur son blanc destrier au volant, Cinn piquant du nez sans complexe en copilote aussi zélé qu’infaillible. 

Les heures qui suivirent furent l’occasion de merveilleuses découvertes l’un sur l’autre, toutes ces petites choses que l’on apprend lorsque l’on passe un peu de temps avec quelqu’un. Je suis donc en mesure d’annoncer publiquement que le Grandbrun possède de nombreuses fonctions utilisables dans des situations les plus diverses.

– électricien hors pair : en arrivant dans la chambre d’hôtel qui nous était réservée (coquette, spacieuse, un coup de coeur à saisir), nous avons dû constater que rien ne se passait quand on appuyait sur l’interrupteur principal de la pièce. Qu’à cela ne tienne ! Grandbrun a presque immédiatement perçu, d’une manière sans doute intuitive et mystérieuse, qu’il suffisait d’asséner un coup énergique sur le côté de la lampe pour mettre fin au faux contact. Que la lumière soit! Et la lumière fut.

– calorifère : on est peut-être théoriquement en pleine canicule, mais la proximité de la mer (ça ne peut être que ça) faisait qu’il faisait un peu frisquet dans le joli petit restaurant-avec-vue-sur-le-port-ultra-ravissante où nous nous sommes restaurés le soir même. Car le petit restaurant était certes romantique au possible, mais on y aimait l’air du large au point de garder les fenêtres ouvertes jusqu’à une heure avancée de la soirée… Fort heureusement, à elles seules, les mains toutes chaudes de Grandbrun autour de celles de Cinn ont su réchauffer la petite chose bleuâtre et frigorifiée qu’elle était devenue. Nota : pour imaginer correctement la scène, il n’est pas inutile de préciser que Cinn portait un blouson par dessus son pull, tandis que Grandbrun portait une légère chemise d’été, manches courtes, deux boutons négligemment ouverts.

– de plus en plus fort, voire unique au monde. Mesdames et Messieurs, Grandbrun a un mystérieux talent, un flair surnaturel pour repérer les endroits où il y a le Wi-Fi. Sans même déplier le portable dont il ne se sépare que difficilement et sous la torture, il lui suffit d’humer l’air pour déclarer qu’il en sent un pas très loin, par là. Ou (avec une grimace de dépit) : "Oh… une clé WEP. Il va juste me falloir un peu plus de temps alors…".

Tout allait donc pour le mieux jusqu’à un message téléphonique de Lex, tombé de nulle part :

"J’ai eu un accident…."

Week-end de dolce vita : 1 ; Lex : 1

Just Whistle

Il y a des fois où la vie semble couler de source. Où il on dirait qu’il vous suffit de siffler, de claquer des doigts ou de dire "supercalifragilisticexpialidocious", pour que la chance vous sourie, que tous les feux passent au vert dès que vous approchez, que la dernière baguette de la boulangerie soit pour vous, et tutti quanti.Bewitched_Wallpaper

Vous passez devant un cinéma avec l’idée de repérer l’horaire d’un film pour dans l’après-midi. Tiens ! Celui que vous vouliez voir est précisément sur le point de commencer. Là, dans dix minutes. Le temps de prendre votre place, et vous aurez échappé à toutes les pubs.

Vous entrez dans la salle de cinéma bondée. Vous êtes deux, mais les seules places disponibles sont isolées et systématiquement à quatre rangs de distance les unes des autres. Vous vous demandez si cela va être aussi divertissant de suivre le film toute seule dans votre coin et d’attendre la fin de la séance pour faire le debriefing qui s’imposera avec le grand brun qui vous accompagne.  Et voilà que ledit brun repère un quidam assis entre deux sièges vides, dans un recoin de la salle qui vous avait complètement échappé. Le quidam aurait-il la gentillesse de… ?… et voilà comment on se retrouve à occuper les deux dernières places mitoyennes de la salle pour regarder "Ratatouille" (excellentissime, "Ratatouille", d’ailleurs).

Un peu plus tard, vous déjeunez au snack-bar voisin. Vous ne prenez que deux menus, mais le vendeur, avec un sourire, et sans la moindre raison rationnelle de vous faire une fleur, vous tamponne d’office tous les espaces restant sur votre carte de fidélité.

marypoppinsA moi Sainte Marie Poppins ! Les enchanteurs ne sont pas loin…

Le coeur et la cam

"Salut. Y’a personne qui fait des chaud sur msn ?"

Ainsi s’est annoncé, aux petites heures de la nuit, un nouvel arrivant sur le Minichat des Perles du Chat de Ralphy. Pour la petite histoire, ce garçon s’est impatienté et a lancé un "ouou" à la cantonnade la minute d’après. Dix minutes plus tard, la chance lui souriait : la belle Claire-Morgane répondait à son appel. En vain : le Roméo nocturne était reparti.

Roméo n’était ni le premier ni le dernier à chercher sur un chat une jeune fille (ou plutôt une femme quelle qu’elle soit) prête à partager une webcam chaude sur une simple invitation.

Son originalité, au jeune Roméo, ce qui le rend profondément humain et touchant, c’est qu’il avait renoncé au légendaire anonymat du net et qu’il avait laissé l’adresse de son skyblog en guise de signature.

Skyblog où, surprise !  Roméo explique en termes choisis à une jeune fille qu’elle est l’objet de sa tendre inclination : Je lui laisse la parole, à mi-chemin entre la pâmoison et la jalousie envers la petite veinarde : "tu peux pas svoir à quelspoint jtm tres bcp fort tes vraiment trop belle […] respais à chouchou ses une fille qui a trop la classe [… ] tes une fille qui cartonne tous de cher tous […] chouchou ses une femme de feu […] j’esper que jamais personne te face du malle […] tes comme ma grande soeur [!]" sans oublier les promesses d’avenir : "tkt pas avec moi tsras la plus heureux on fras tous ce que tu vx". Bref, un vrai héros romantique.

Oui mais… Chouchou est-elle au courant des investigations nocturnes de son amoureux transi ? Quelque chose me dit que non, et même que dans l’esprit de Roméo, Chouchou et Claire-Morgane appartiennent à des mondes différents, à des segments de vie si distincts qu’il ne portera aucun tort à Chouchou en essayant de convaincre Claire-Morgane de lui accorder un petit moment coquin.

Webcamer, est-ce tromper ?

Certes, dans une webcam chaude, l’autre n’est pas grand chose de plus qu’un objet sur lequel un jeu sexuel est projeté. Un peu comme un film X, mais en plus interactif. Rien à voir avec la jeune femme pour qui il a des sentiments.

Il n’empêche que ce jeu-là se passe avec une partenaire qui existe en réalité, avec une "femme IRL", avec un autre être humain. Le "virtuel" n’est qu’une illusion. A la différence du fantasme, la personne "virtuelle" est de chair, de sang, et de neurorécepteurs. Que cet humain-là ait dans l’affaire le rôle d’un objet ne change pas grand chose à mes yeux : il s’agit quand même d’une femme (ou d’un homme, dans l’hypothèse inverse, évidemment). Une personne mariée qui a une aventure réelle, mais sans sentiments, avec une autre personne, est infidèle, quand bien même l’autre n’a été qu’un corps pour cette personne. Pourquoi en irait-il différemment d’une personne qui a une relation sexuelle, fût-elle virtuelle, avec une autre ?

A mes yeux, un rapport virtuel est donc une infidélité.

Avec un seul avantage : l’absence quasi-totale de risque de contagion vénérienne.

Qu’en pensez-vous ?    

« Victor, nettoyeur »

rubberballIl semble que la cavale de mon poisson rouge ait tourné court.

Je l’imaginais profitant de sa toute nouvelle liberté, où certes la pureté de l’eau laisserait un peu à désirer, mais où nul bocal n’entraverait ses mouvements et où il ferait des tas de découvertes passionnantes. Ce serait une vie libre et sauvage, telle que le Seigneur l’a souhaitée pour un petit ostéichthyen. Incidemment, je me disais que l’étendue de sa capacité de concentration limiterait l’intérêt de ces expériences, mais il semble que la "mémoire de poisson rouge" de 3 secondes ne soit qu’une légende. Bref, la belle vie.

poisson_route

Hélas, trois fois hélas. Une odeur de poisson pas frais s’est mise à s’échapper du lavabo.

Sans vouloir tirer de conclusions hâtives, je pense que c’est mauvais signe.

Cela pourrait être un début d’indice que le tuyau qui relie le trop-plein à l’évacuation d’eau principale doit en fait se rétrécir avant d’atteindre celle-ci (on ne peut pas le voir de l’extérieur). Donc que la bestiole aurait connu, à peine libre, une mort muette par asphyxie.

Paix à son âme. Et maintenant, je fais quoi pour l’odeur ?

J’ai administré à mon trop-plein un petit gobelet de liquide destiné à "éliminer les résidus et supprimer les mauvaises odeurs" des canalisations. Ca m’a paru tout indiqué. 

Le cadavre du poisson devrait donc sous peu être dissous par  l’acide qui, soit dit en passant, est "à base de produits naturels" et à "95% biodégradable" (je dis ça pour  tenter de rentrer dans les bonnes grâces de mes commentateurs brigittebardotiens,  ce qui au vu des réactions au dernier billet, n’est pas gagné).victornettoyeur

Appelez-moi : Victor, nettoyeur.