Archive for juin 9th, 2007

Rackettée et délatrice

Il se tenait devant moi, immobile et déterminé. Bien plus grand et au moins deux fois plus large que moi, il devait faire plusieurs fois mon poids et il devenait de plus en plus évident qu’il n’avait pas l’intention de me rendre mon argent.

Je ne me suis pas laissée impressionner pour autant. Le foudroyant du regard, fulminant, je l’ai frappé une fois, puis deux. Il n’a pas bronché, à peine frémi.

En désespoir de cause, j’ai appuyé sur le bouton "annulation", mais la brute avait oublié jusqu’à la couleur de ma (dernière) pièce. J’ai réessayé une tape vigoureuse sur le côté de la machine, la barre de chocolat mousse est restée en équilibre au bout de sa rangée, retenue par sa spirale métallique, et n’a pas voulu tomber derrière le battant prévu à cet effet.

Comme ce n’est pas la première fois que cela m’arrive, j’ai décidé d’essayer, cette fois, le numéro de service clientèle indiqué sur la vitre de l’appareil. Samedi matin, 8 heures, et pourtant j’ai tout de suite eu quelqu’un en ligne, qui m’a crue sur parole quand j’ai dénoncé mon racketteur en donnant son numéro de série. On m’a promis de m’envoyer rapidement mes un euros cinquante. Non mais.

Enfin une histoire de racket qui finit bien.

To fool or not to fool

Il était une fois Invidia, une jeune femme visiblement stupide, vulgaire, égoïste, méchante et prétentieuse, mais qui se décrivait comme parfaite, physiquement et moralement. Son avatar était un plan rapproché de la générosité de son bonnet D (voire E). Le nom de son blog ? "Parfaite en tous points". Après des billets où le trait de provocation était devenu de plus en plus gros, ce blog a, à ma connaissance, disparu. Je n’ai jamais été sûre à 100% de son inauthenticité. Quelle démangeaison intellectuelle ! J’y étais devenue régulière, même si je m’amusais plus, à la fin, des commentaires qu’Invidia suscitait que du contenu des billets en lui-même.

Dans "Princess Bride", (le livre), William Goldman présente son histoire comme des extraits d’un livre beaucoup plus long -et rasoir!- qui serait essentiellement une satire politique. En somme une intrigue tout à fait secondaire et insignifiante aux yeux de Simon Morgenstern, l’auteur originel. Il nous explique avec moulte détails, tous plus fictifs les uns que les autres, comment il en est arrivé à rédiger cette version "expurgée". Le jeu avec le lecteur, dans ce cas, est patent.

Là où le romancier dit : "Je vais vous raconter une histoire (….quitte à ce que ce soit un peu la mienne)" le bloggeur dit " je vais vous livrer mes pensées (… même si ce sont, au choix et pêle mêle, mes rêves, mes histoires, mes mensonges, mes passions, mes compétences et ma vie)". Autrement exprimé, à mes yeux de néophyte, le romancier est présumé être dans l’imaginaire (même s’il s’inspire de la réalité) et le bloggeur présumé être dans la réalité, même s’il présente son imaginaire comme une réalité.

Je n’ai absolument rien contre l’idée de blogs fictifs ou semi-fictifs (réalité enjolivée…). Les possibilités sont infinies et il serait dommage de s’en priver. Il est de sucroît franchement sain, que ce soit devant une oeuvre littéraire (blog ou autre) ou un site (ou support) journalistique, de pouvoir se questionner sur l’authenticité de ce qu’on lit.

Oui, mais jusqu’où peut-on faire confiance à la clairvoyance d’un public tout en prétendant continuer à le respecter ? Le bloggeur qui provoque joue avec les réactions de ses lecteurs, lesquels peuvent éventuellement réagir légitimement à une situation perçue, au départ, comme réelle. Il ne joue plus avec eux, il se joue d’eux. Et si cela pouvait même parfois conduire à des situations dangereuses ?

 

C’est aussi un jeu parfois , pour des sites d’actualité, de présenter de fausses nouvelles présentées comme vraies. Au lecteur le plaisir du jeu de discerner le vrai du faux… Je vous parle des poissons d’avril, bien sûr, qu’alliez-vous imaginer ?

A partir de quel moment est-il nécessaire de préciser qu’une oeuvre est une oeuvre de fiction lorsqu’elle présente l’apparence de la réalité ?

Jusqu’où peut-on jouer ?