Il faut qu’une fenêtre soit ouverte ou fermée (mais je préfère ouverte).

Tranche de vie de bureau.

C’est le début d’après-midi. Nous revenons les unes après les autres de notre pause déjeuner. Psyko fait « pfouu » en entrant dans le bureau.

« Pfouu« . Il faut dire qu’elle vient de monter un certain nombre d’étages à pied, alors qu’elle est encore convalescente.

Et Binômette explose, mais explose d’un coup : « NON CE N’EST PAS MOI QUI AI MIS LES RADIATEURS A FOND! »

Elle est vraiment exaspérée. Elle gronde, mais d’une manière qui se veut « publiante ».On sent dans son ton qu’il y avait quelque chose qui couvait depuis tout à l’heure en elle, sans que rien ne soit dit, qu’à partir de cet instant, nul ne sera censé l’ignorer, que si elle pouvait afficher son déni de responsabilité quant à la chaleur qui règne dans le bureau, si elle pouvait le clamer au porte-voix, elle le ferait.

Les quelques semaines de grâce où j’avais l’impression que Binômette était plus facile d’abord sont terminées. Peut-être que quelque chose s’est passé dans sa vie privée, ou que le naturel est revenu au galop après des efforts surhumains, en tout cas elle a repris assidûment la technique qui consiste à lancer des petites piques très ciblées à la cantonade, ou à un tiers, et le bureau a repris une atmosphère normale (de cathédrale, donc).

C’est vrai, il fait très chaud. Le chauffage ne fonctionnait pas du tout les jours précédents, et il ne faisait pas très chaud dans les locaux de TBT. Alors, on est venu le réparer, mais en laissant tout le réseau de chauffage ouvert à fond, pour faire circuler l’eau paraît-il, ou pour ne pas que ça s’encrasse (ça doit être un truc technique sophistiqué). Bref, la chaleur était intenable, on était passés du frigo au sauna, mais pour l’instant on ne pouvait rien y changer (le réparateur avait omis de préciser jusqu’à quand il fallait décrasser le système).

Le hic, c’est que l’aération du bureau peut devenir un sujet à haut risque, une occasion rêvée de déclencher une guerre ouverte, la Grande Guerre des Fenêtres Ouvertes ou Fermées. Ca s’est vu.

Jusqu’ici, je m’étais abstenue de répondre aux tentatives de Binômette pour déclencher les hostilités. Je ne m’opposais jamais à ce qu’il fît plus chaud ou plus froid. Plutôt crever que de déclencher une polémique, ou plutôt d’en donner l’occasion.; Si j’avais froid, je prévoyais une petite laine, si j’avais chaud, une boisson fraîche. Si j’étais seule, je m’autorisais une aération de la pièce. Binômette, invariablement, refermait la fenêtre assez brutalement dès son retour, mais sans m’extorquer un battement de cil.

Mais cette fois, quand je suis entrée dans le bureau après l’heure de déjeuner, il a fallu se rendre à l’évidence : Les yeux me brûlaient, la tête me pesait, je ne pourrais pas continuer à travailler comme ça. il allait falloir intervenir. Trouver une technique diplomatique de haut vol pour faire passer la motion en douceur.

Binômette a t’elle perçu mon malaise ? En tout cas, Djeunette n’en a pas montré, et celui de Psyko était hors sujet. Cela s’est transformé, je crois, dans son esprit, en une muette mise en accusation générale.

Eberluée de sa réaction, donc, j’ai regardé Djeunette, puis Binômette. La situation m’a fait rire, doucement, puis moins discrètement.

J’ai réussi à la regarder en riant de la situation sans rire d’elle, car je l’ai vue glisser de la colère à un demi-rire.

Un appel aux services généraux plus tard, j’avais le feu vert pour baisser les radiateurs.

La Grande Guerre de la Fenêtre Ouverte ou Fermée n’aura pas lieu.

Pour l’instant.

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