Archive for mai 3rd, 2008

La crêpe de la tentation

C’est, sans aucun doute, un lieu dédié aux plaisirs des sens et à la décadence.

Dès notre arrivée, une jolie hôtesse nous montre notre place. Il s’agit de l’une des six tables alignées sur toute la largeur de la petite crêperie. Le décor est simple, l’ambiance agréable. Reste à savoir si la cuisine est bonne…

C’est là que la géographie des lieux intervient. Car les six tables évoquées plus haut sont à présent toutes occupées, par des convives arrivés deux par deux, à quelques minutes d’intervalle. Les commandes ont été prises à peu près dans le même ordre et au même rythme, et les plats vont donc arriver les uns après les autres en partant de la table la plus éloignée, pour se rapprocher de nous.

Il suffit donc de surveiller la vague successive de délices qui se déposent devant nos voisins pour avoir une idée de ce qui nous attend.

A deux tablées de nous, deux assiettes fumantes, copieusement remplies, atterrissent devant nos presque voisins. Coups d’oeil en coin. S’agit-il d’un plat de la carte, d’une suggestion du jour ? On distingue bien, avec des coups d’oeil obliques presque discrets, d’appétissantes pommes de terre parsemées de fines herbes, mais s’agit-il de poisson ? De coquilles Saint Jacques?… Non!.. non, ce serait inconcevable, impensable : normalement les Saint Jacques sont servies avec des pâtes aujourd’hui. il y aurait eu traitement de faveur, 

De toute manière, ce sont des galettes de sarrasin que nous avons commandées. Justement, juste à côté de nous, arrive une, puis deux galettes de blé noir, dont l’une est accompagnée d’une salade verte et d’une tranche de tomate

Nous sommes fixés : ce sera délicieux.tentation

Sa crêpe avalée, une jolie jeune fille de la même rangée de table se décide : Je m’en tiendrai là, je ne prendrai pas de dessert. Ce n’est pas bon pour ce que j’ai. Crêpe ou glace, vous ne m’aurez pas, je serai forte pour défendre mon tour de taille.

Et à la table voisine, arrivent une coupe de chocolat chapeautée d’une toque de crème chantilly et une énorme crêpe nappée de chocolat, elle aussi décorée de crème.

Les yeux bleus louchent vers l’assiette voisine :

"…Elle me fait envie, la crêpe du monsieur".

Est-ce l’odeur du chocolat chaud ? La pointe de crème blanche, tentatrice, restant un instant au coin de nos lèvres ? Toujours est-il que le temps que la serveuse revienne, la petite blonde avait craqué :

"Je prendrai une crêpe chocolat-banane-chantilly"

C’en était trop pour nous :

"… Copieuse !..

– Elle a succombé!!"

Confuse et rosissante, sous les huées, elle s’est caché le visage derrière son menu.

Mais la crêpe étant réellement succulente, je pense qu’elle n’a pas regretté d’avoir cédé à la tentatrice.