Incontournable

Quand on est à un même poste depuis près d’un an, il vient un moment où l’on devient indispensable.

Comme il est gratifiant, ce moment où l’on devient une référence, où, confrontés à un problème, vos collègues se souviennent que vous avez déjà traité des soucis similaires avec brio, et où ils se tournent tout naturellement vers vous en sachant que vous êtes sur le point, une fois de plus, d’accomplir un miracle sous leurs yeux émerveillés ?

Moi, c’était pour une opération chirurgicale. Et quelle urgence.

La machine a café était coincée.

C’était un boulot pour Super-Cinn.

C’est un des petits détails qui rend si plaisant le travail chez la TB Team : Il y a une machine à expresso, vous savez, comme celle dans la pub avec Georges Clooney, mais en version professionnelle, avec des dosettes plates pour que les petits malins n’en chipent pas pour les utiliser chez eux. Une machine, un peu de détartrant, trois sortes de café différentes, de jolies tasses. Je n’irais pas jusqu’à dire que c’est comme si George était dans le bureau avec nous, mais c’est plaisant.

Oui mais voilà : si l’on ne prend pas soin de lisser les bords desdites petites dosettes plates, elles se coincent dans les tuyaux de la machine. Et là, si on ne connaît pas quelques techniques de base, il faut faire appel au service après-vente.

Ce service technique là est assez extraordinaire. L’accueil est aimable, souriant (oui, ça s’entend au téléphone), immédiat, classe. Les conseils sont précis et méthodiques. Suave, la voix de la conseillère me demanda d’abord de « me rapprocher de » la machine, et accepta sans difficulté de me rappeler sur mon portable pour que je puisse le faire sans faire traîner derrière moi mon téléphone fixe professionnel.

Après quelques vérifications (Y avait-il eu un détartrage récemment? La machine en avait-elle l’air satisfaite?), le processus de dépannage a commencé. Ca a l’air tout simple comme ça, une machine à kawa, mais il y a des trucs à savoir. Avant d’appeler pour la première fois, par exemple, j’avais bien eu l’idée de retirer le bac à capsules pour essayer d’attraper la capsule rebelle de l’intérieur, mais comment aurais-je pu deviner que le fait d’éteindre et de rallumer la machine permettait de la « réinitialiser » ? Aurais-je osé essayer de forcer comme une sauvage l’ouverture du petit volet avec un couteau pour atteindre la dosette du bout de ma lame ?

En fait, j’avais déjà tenté tout ça avant d’appeler, parce que ce n’était pas la première fois que je faisais appel à la voix suave. Du coup, je me demandais bien ce qu’elle aurait de plus à me proposer.

Et bien ça a marché quand même. Elle m’a demandé de refaire tout ça, plusieurs fois de suite. Redémarrage. Farfouillage dans les entrailles de la machine du bout des doigts. Forçage du petit volet. Reredémarrage. Refarfouillage. Oui, elle était là, je la sentais du bout des doigts, mais sans pouvoir m’y accrocher. Milimètre par millimètre, je la faisais tourner. Et encore, et encore. Redémarrage. Farfouillage. Couteau. Si ça ne marchait pas, on programmerait une intervention, me promettait-elle. Mais quelle angoisse, cela voudrait dire que mes collègues resteraient plusieurs heures, voire un jour entier, sans leur excitant ?Les abandonner, c’était l’échec, le déshonneur. Comment porterais-je la responsabilité (fût-elle partielle) d’une telle catastrophe ? Que deviendrait dans tout ça notre qualité de service, légendaire elle aussi ?

L’obstination a fini par payer. Le petit volet a fini par rester entr’ouvert, et  à l’aide d’une pince à épiler, j’ai délicatement extrait la première capsule. La deuxième a suivi bien plus facilement. C’était fini.

Une fois de plus, Cinn avait sauvé tout le service. Who else ?

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